mardi 8 février 2011

Appel contre le marché des ventres


Cet appel est une initiative du collectif No Body For Sale. Il rassemble des personnalités de tous horizons qui se mobilisent pour l’abolition de toute forme de marchandisation du corps féminin, et en particulier pour l’abolition de la pratique des mères porteuses, nouvelle extension du domaine de l’aliénation. Il lance une campagne internationale pour l’abolition de la pratique des mères porteuses, pour laquelle un colloque sera organisé en France mi 2011.
Si vous souhaitez vous joindre à cette pétition : http://www.petitions24.net/appel_contre_le_marche_des_ventres-






Aujourd’hui encore, on considère trop souvent le corps des femmes comme un objet disponible. On attend d’elles qu’elles se dévouent, d’une façon ou d’une autre, qu’elles se donnent ou qu’elles se vendent.


Les innovations de la médecine procréative, précieuses pour combattre l’infertilité, comme la fécondation in vitro (FIV) et la transplantation d’embryons, permettent de séparer la fécondation de l’enfantement lui-même (grossesse et accouchement). C’est ainsi qu’est devenue possible l’idée d’utiliser le ventre d’une femme pour porter un embryon destiné à d’autres.


L’utilisation de « mères de substitution » (surrogate mother) s’est ainsi répandue dans certains Etats américains, en particulier en Californie, où s’affichent sans fard des annonces de « ventres à louer » (Wombs for rent), ce qui n’empêche pas ce marché de se délocaliser dans les pays pauvres, en Europe de l’Est ou en Inde, où les femmes étant beaucoup plus pauvres, les tarifs sont nettement moins élevés.


Jusqu’ici, la France, comme la plupart des pays européens ou le Japon, a jugé cette pratique incompatible avec le respect dû à la personne et à son corps. Certains, à gauche comme à droite, proposent pourtant de l’introduire dans notre droit sous le nom aseptisé de « Gestation pour autrui », pour assurer à tous « le droit de fonder une famille », en tâchant d’éviter toute « commercialisation ». Un débat de fond a eu lieu, en 2010, sur la question, amenant à de premières prises de position d’élus socialistes, communistes, du Parti de Gauche ou Europe Ecologie-Les Verts, le bureau national du Parti Socialiste s’étant prononcé pour l’interdiction des mères porteuses le 14 décembre dernier.


Quand certains évoquent une logique généreuse du « don », force est de constater en effet, dans la pratique, que le bénévolat n’existe pas en ce domaine. Là où elle est autorisée, même très encadrée, comme au Royaume Uni, la maternité pour autrui est toujours rémunérée, sous forme de salaire ou de « dédommagement », bien au delà de la couverture des frais médicaux. Et comment pourrait-il en être autrement ?


Qu’une femme mette gratuitement ses organes et neuf mois de sa vie à disposition d’autrui sans contrepartie financière n’est imaginable que dans des cas tout à fait exceptionnels (comme pour les dons d’organes entre parents, et encore, pour sauver une vie). Mais la maternité pour autrui ne peut justement pas se pratiquer dans un cadre intrafamilial en raison des implications indirectement incestueuses qu’elle comporterait (tout le monde s’accorde là-dessus). C’est pourquoi, là où elle est permise, cette pratique donne toujours lieu à une rétribution de la grossesse et fixe un prix à l’enfant ainsi « produit ». L’enfantement devient alors un service social et la sphère économique s’empare de la vie la plus privée et la plus intime d’une personne.


Loin de pouvoir s’inscrire dans le registre du don gratuit, toute forme de légalisation de cette pratique engage donc une marchandisation du corps féminin et de l’enfant. Ce nouveau marché du corps est ainsi indissociable de toute « gestation » pour autrui et n’en constitue nullement une « dérive » que l’on pourrait éviter.


Il faudrait rester aveugle au développement d’un marché procréatif mondial - sur lequel les gamètes et les ventres s’échangent, pour le plus grand profit de cliniques et d’instituts spécialisés - pour oser encore rattacher la mise à disposition du corps des femmes à un échange « altruiste ».


Le marché des ventres, là où il est autorisé, constitue en fait une incitation à se vendre pour les femmes les plus vulnérables, une forme nouvelle d’exploitation et de servitude.


On ne peut assimiler la grossesse, qui concerne la vie la plus intime d’une femme, à un travail social au terme duquel la « gestatrice » remettrait finalement son produit à des commanditaires. Il faut se faire une étrange idée du rapport des femmes à leur vie propre et à leur corps, pour croire qu’elles peuvent vivre neuf mois, jour et nuit, au service d’autrui sans aliéner profondément leur personne. De plus, là où la pratique a été légalisée, les contrats d’engagement d’une « mère porteuse » entraînent une véritable mise sous tutelle de sa vie la plus intime : son alimentation, son mode de vie, sa sexualité, l’obligation d’avorter dans certains cas, etc. Pour ne rien dire de l’accouchement, avec ses risques non négligeables (épisiotomie, césarienne, voire hémorragie), qui se trouve alors inclus sans scrupules dans le cadre d’un échange commercial.


Dans la pratique, contrairement à ce qu’affirment ses partisans, les contrats de mères porteuses donnent lieu à une multiplication de conflits souvent dramatiques entre les femmes qui s’y prêtent et ceux qui les utilisent. Quant aux nombreux risques physiques et psychologiques (pour la femme et pour l’enfant qu’elle porte), qui pourra les évaluer ?


Nous soutenons par conséquent que la maternité pour autrui constitue en réalité une aliénation profonde de la personne tout entière et une marchandisation de son corps et de celui de l’enfant ; qu’elle est par là contraire aux droits fondamentaux de la personne et à la dignité de son corps, et qu’elle ne saurait être légitimée par des désirs ou des intérêts subjectifs. Il ne peut y avoir de « droit à l’enfant ».


Loin d’être un progrès, toute légalisation de cette pratique représenterait une régression du droit, une extension du domaine de l’aliénation et un mauvais combat pour la gauche et pour les femmes. Nous appelons toutes celles et tous ceux qui sont attachés aux droits de la personne humaine à se prononcer pour le maintien de l’illégalité du marché des ventres en France et à lutter pour son abolition là où il existe, en particulier au sein de l’Union européenne. Telle devrait être, sur cette question importante pour la dignité des femmes, l’engagement de tout candidat de gauche aux élections présidentielles de 2012.


Les premiers signataires de l’appel contre le marché des ventres, à l’initiative du collectif « No Body For Sale » (février 2011)



association Libres MarianneS
Le Planning Familial (mouvement français pour le planning familial)
Patricia Adam, députée du Finistère (PS)
Sylviane Agacinski, philosophe
Pascale Alix, militante socialiste
Marie-Hélène Amiable, Députée des Hauts-de-Seine
Kader Arif, parlementaire européen (PSE)
professeur Paul Atlan, gynécologue
professeur Jean-Marc Ayoubi
Laurence Azoux Bacrie, avocate, co-responsable de la commission santé et bioéthique de l'Ordre des Avocats
Marie-Laure Baldanza, conseillère municipale de Cabourg
docteur Clarisse Baumann, généticienne
Huguette Bello, Députée-Maire de Saint-Paul, La Réunion
Catherine Bergeret-Amselek, psychanalyste
docteur Roger Bessis, vice-président du Collège français d'échographie fœtale
Martine Billard, députée de Paris (PDG), co-présidente du Parti de Gauche
Béatrice Blanchy
Docteur Pascal Boileau, chirurgien
Nicole Borvo Cohen-Seat, sénatrice de Paris (PCF), présidente du groupe CRC-SPG du Sénat
Jean-Louis Bouche
Marie-Odile Bouillé, députée de la Loire-Atlantique (PS)
Claude Boukobza, psychanalyste, co-fondatrice de l'Unité d'Accueil Mères-Enfants de l'Hôpital de Saint-Denis
Pierre Bourguignon, député-maire de Sotteville les Rouen (PS)
Danielle Bousquet, députée des Côtes d'Armor (PS)
Nadine Bouteilly-Dupont, secrétaire générale des Libres MarianneS
François Boutin, membre du parti socialiste
Laurent Bouvet, professeur de science politique
Gérard Bréhier
Bénédicte Bréhier-Aubry, retraitée
Nicole Bricq, sénatrice de Seine-et-Marne (PS)
Danièle Brun, professeur émérite de l'université Paris-Diderot, présidente de la société Médecine et psychanalyse
Docteur Joëlle Brunerie-Kauffmann, gynécologue
Marie-Georges Buffet, députée de Seine Saint-Denis (PCF), ancienne ministre
Marie-Claire Busnel, Chercheur, éthologiste, spécialiste de l’audition foetale
Monique Bydlowski, directrice de recherche honoraire à l'Inserm
Laure Caille
Constance Canivet
Francine Caumel-Dauphin, présidente de l'organisation nationale des syndicats des sages-femmes
Jacqueline Chabridon, directrice de communication
André Chassaigne, député du Puy-de-Dôme (PCF)
Hervé Chneiweiss, neurobiologiste
association Choisir la Cause des Femmes
Alain Christnacht
Thierry Cladart, membre du parti socialiste
Alain Claeys, député-maire de Poitiers (PS), Président de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique
Marie-Françoise Clergeau, Députée de Loire Atlantique (PS) et Adjointe au Maire de Nantes
Françoise Clouzet, médecin
Yves Cochet, député de Paris (EELV), ancien ministre, président du groupe de la Gauche démocrate et républicaine à l'Assemblée nationale

Françoise Collin, philosophe
Dominique de Combles de Nayves, avocat
Geneviève Couraud, conseillère d'arrondissements, Marseille 8è secteur, Présidente ODF-13
François Couraud, praticien hospitalier, professeur des universités (PUPH)
Guillaume Cubero
professeur Bernard Debré
Ursula Del Aguila, journaliste
Michèle Delaunay, députée de la Gironde (PS)
Bernard Derosier, député et président du conseil général du Nord (PS)
Réjane Di Bianca
Bruno Di Palma, professeur d'arts plastiques
Irène Diamantis, psychanalyste
Clara Domingues, secrétaire générale de l'association "L'égalité, c'est pas sorcier !"
Catherine Dolto, haptopsychothérapeute
Annick Drogou, professeur de lettres
Charlotte Dudkiewicz-Sibony, psychologue psychanalyste 
Laurence Dumont, députée du Calvados (PS)
Philippe Duron, député-maire de Caen (PS)
François Durpaire, président du mouvement pluricitoyen
Dr Jean Ebert, psychiatre, chef de service de l'hôpital mère-enfant de l'est parisien
Caroline Eliacheff, psychanalyste
Docteur Sylvie Epelboin, gynécologue-obstétricienne
Cécile Escobar, adjointe au Maire de Cergy
Claude Evin, ancien ministre de la solidarité et de la santé
Marie-Thérèse Eychart, adjointe au maire, Paris 10ème
Isabelle Fatout
Martine Faure, députée de la Gironde (PS)
Florence Faurie-Vidal
Geneviève Fioraso, députée de l'Isère (PS)
Viviane Forrester, écrivain
Danièle Frager, chargée de mission au ministère des affaires étrangères
Sébastien François, conseiller municipal de Bourguébus
professeur René Frydman
Jean Gaubert, député des Côtes d'Armor (PS)
Jean-Paul Gauchard, maire d'Ifs (Gauche citoyenne)
François Geindre, Inspecteur Général MEEDDAT
Sylviane Giampino, psychanalyste, psychologue petite enfance
Bruno Gilbert, secrétaire adjoint de la section du PS de Colombelles - Calvados
Dominique Gillot, maire d'Eragny-sur-Oise (PS), ancienne ministre
Roger Godinot
Sandrine Goldschmidt, journaliste
Luc Gourand, gynécologue-obstétricien
Maxime Gremetz, député de la Somme (PCF)
Docteur Roland Gros, maire adjoint d'Eragny
Elisabeth Guigou, députée de Seine Saint-Denis (PS), secrétaire nationale chargée de la réforme de l'Etat et des collectivités locales du parti socialiste
Fabrice Guilbert
Jean-Claude Guillebaud, écrivain et journaliste
Gisèle Halimi, avocate
Caroline de Haas, porte-parole de Osez le Féminisme
Daniel Hélouin
Docteur Delphine Héron, pédiatre généticienne
Emmanuel Hirsch, philosophe, directeur de l'Espace éthique Assistance publique-Hôpitaux de Paris
François Hollande
Robert Hue, sénateur (PCF)
Emmanuelle Jardin-Payet, conseillère municipale d'Hermanville sur Mer
Agnès Jeannet, Haut fonctionnaire
Jacques Johnston
Brigitte Joseph-Jeanneney
Lionel Jospin, ancien Premier ministre
Danièle Jourdain-Menninger, professeure associée, conseillère municipale
Jacques Julliard, historien et journaliste
Armand Jung, député du Bas-Rhin (PS)
Axel Kahn, président de l'Université Paris Descartes
Marin Karmitz, producteur
Béatrice Koeppel, psychologue
Blandine Kriegel, philosophe
professeur Frédérique Kuttenn, endocrinologie et médecine de la reproduction
Denis Labigne, maire-adjoint de Dives sur Mer
professeur Philippe Labrune, pédiâtre
Jean-Jacques Lacoste, maire honoraie de Bretteville sur Laize
Jacqueline Lacour, retraitée Maire
Bruno Laforestrie, président de la radio Génération
Louise Lambrichs, écrivain, philosophe
Céline Laroche
Bettina Laville, avocate et présidente d'associations
Marie-France Le Bras, enseignante en retraite
Hervé Le Bras, démographe, directeur d'études à l'Institut National d'Etudes Démographiques (INED)
Jean-Yves Le Déaut, député de Meurthe-et-Moselle (PS) et premier vice-président de la Région Lorraine
Annick Le Loch, députée du Finistère (PS)
Annick Le Roux, Professeure émérite d'université et Visiteuse de Prison
Marylise Lebranchu, députée du Finistère (PS), ancienne ministre
Marie-Christine Lecomte, présidente de Libres MarianneS
Patrick Lemasle, député de la Haute-Garonne (PS)
Michel Lemaure
Gaëlle Lenfant Vice-Présidente du Conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'azur, secrétaire nationale adjointe aux droits des femmes du parti socialiste
Marie-Claire Lenourry
Alain Lhostis, conseiller de Paris (PCF), ancien président délégué de l'AP/HP
Michel Liebgott, député-maire de Fameck (PS)
Françoise Liegard, militante socialiste, Hérouville-Saint-Clair
Sabine Luce
Philippe Luce
professeur Olivier Lyon-Caen, professeur de médecine
Josiane Mallet-Duclos, maire-adjoint de Mondeville
docteur Jacqueline Mandelbaum, biologiste de la reproduction
Eric Marck, conseiller musical
Christiane Marty, Attac
Philippe Mauguin, Ingénieur en chef des ponts, des eaux et des forêts
Sandrine Mazetier, députée de Paris (PS), secrétaire nationale du parti socialiste à l'immigration
Nina Mitz, présidente de société
professeur Pierre Monin, pédiâtre
Thierry Moulin, fonctionnaire
Georgette Moulin
Véronique Neiertz, ancienne ministre

Mathilde Nobécourt, éditrice
Benjamin Ouedraogo, enseignant de philosophie
Olivier Pambou, gynécologue obstétricien
Christine Paris, conseillère municipale



Nicole PERY, ancienne Vice-Présidente du Parlement Européen, ancienne Secrétaire d'Etat aux Droits des Femmes et à la Formation Professionnelle
Evelyne Petroff, gynécologue-obstétricienne
Christian Pierret, maire de Saint-Dié-des-Vosges, ancien ministre
Bernard Poignant, député européen
Anny Poursinoff, députée des Yvelines (EELV)
Catherine Quéré, députée de Charente-Maritime (PS)
Laurent Quidel
professeur Jean-Daniel Rainhorn, Director of Geneva Center for education and research in humanitarian action (CERAH) Université de Genève
Brigitte Rebillard, conseillère municipale
Philippe Relin, conseiller municipal d'Eragny
Hervé Renault, ingénieur
Marcel Rogemont, député de l'Ille-et-Vilaine (PS)
Jacqueline Rogoff, retraitée cadre de banque
Ernestine Ronai, psychologue
Maurice Ronai, sociologue
Laurence Rossignol,  vice-présidente du Conseil régional de Picardie (PS), secrétaire nationale à l'environnement du parti socialiste
Yvette Roudy, ancienne ministre des Droits de la femme
Marcel Rufo, pédopsychiatre
Michèle Sabban, vice-présidente de la région Ile de France, présidente de l'Assemblée des régions d'Europe
Eric Sabine
Sabine Salmon, présidente nationale de Femmes Solidaires
Jean-Loup Salzmann, président de l'Université Paris XIII
Jacques Sédat, psychanalyste
Sylvie Séguret, psychologue
Marie-Françoise Seguy-Flourez
Béatrice Sgorbini

Jean-Pierre Sueur, Sénateur du Loiret
Annie Sugier, présidente de la Ligue du Droit International des Femmes
Maya Surduts, secrétaire générale de la CADAC (Coordination des associations pour le droit à l'avortement et à la contraception)
Myriam Szejer, Pedopsychiatre et psychanalyste, fondatrice de l'association La Cause des bébés
Catherine Tasca, sénatrice des Yvelines (PS), Vice-présidente du Sénat
Jean-Philippe Thiellay, directeur du cabinet d'experts de la fondation Terra Nova
professeur Annick Toutain, médecin généticien
Stéphane Travert, chef de cabinet du maire de Caen
Valérie Trierweiler, journaliste
Jean-Noël Tronc, membre du conseil d'orientation scientifique de la fondation Terra Nova
Daniel Vaillant, député-maire du XVIIIème arrondissement de Paris (PS), ancien ministre
Clotilde Valter, conseillère générale du Calvados, Secrétaire nationale chargée de la Défense au parti socialiste
Catherine Vanier, psychanalyste
Michel Vaxès, député des Bouches du Rhône (PCF)
Jean-Michel Villaumé, député-maire d'Héricourt (PS)
Elisabeth Weissman, journaliste et essayiste
Jean-Pierre Winter, psychanalyste
professeur Jean-Philippe Wolf, biologiste
Henriette Zoughebi, Vice-Présidente du Conseil Régional Ile de France et présidente de l'association "L'égalité, c'est pas sorcier !"
docteur Jacqueline Zuingdhedau



Collectif « No Body For Sale » (http://nonalagpa.blogspot.com)
Le collectif No Body For Sale rassemble des personnalités de tous horizons qui se mobilisent pour l’abolition de toute forme de marchandisation du corps féminin, et en particulier pour l’abolition de la pratique des mères porteuses, nouvelle extension du domaine de l’aliénation. Il lance une campagne internationale pour l’abolition de la pratique des mères porteuses, pour laquelle un colloque sera organisé en France mi 2011.

mardi 1 février 2011

Plusieurs initiatives ont vu le jour, à gauche, en faveur d’une légalisation de la pratique des mères porteuses (Gestation Pour Autrui), associée à l’idée d’une vision « progressiste » de la parentalité.


Le recours aux mères porteuses est, en réalité, absolument contraire à tout engagement de nature « progressiste ». Tandis que les partisans de la GPA soutiennent que la pratique des mères porteuses, là où elle est légale, se déroule dans l’ensemble de manière positive, une étude concrète de ces pratiques aboutit à une conclusion inverse, à travers un quadruple constat :

- Loin de régler des problèmes, la légalisation des mères porteuses est un piège juridique qui entraîne une multiplication de conflits souvent dramatiques,

- La marchandisation du corps féminin est la conséquence concrète et quasi-universelle de cette légalisation. Elle conduit ainsi à une nouvelle exploitation, radicale, des femmes pauvres,

- Les conséquences psychologiques de cette pratique sont largement sous-estimées, et peuvent être graves,

- Les mères porteuses, loin d’être un progrès, sont une cause régressive et un mauvais combat pour la gauche, la plus récente et peut-être la plus choquante des extensions du domaine contemporain de l’aliénation.


Si vous souhaitez vous joindre à cette démarche, vous pouvez écrire  à l'adresse suivante : nonalagpa@gmail.com

Dans votre message, merci de préciser si vous souhaitez que votre nom apparaisse sur ce site, aux côtés  des actuels signataires.
  • "Face aux risques que représentent l’instrumentalisation du corps de la gestatrice et sa possible marchandisation, l’interdiction de la gestation pour autrui (GPA) doit être maintenue". Le 14 décembre, le Bureau national du Parti socialiste a écarté, avec netteté, et à une large majorité, toute perspective de légalisation de la GPA.
  • Bericht des IDA IG an GSK 2006
    Le Planning Familial : « La femme n’est pas un outil vivant » (janvier 2011)


lundi 31 janvier 2011

La régression sociétale d’un système de « location-ventre »

Danièle Jourdain Menninger
Professeure associée à l’université de Paris-1 Panthéon-Sorbonne (*)

Dans la perspective de la révision des lois de bioéthique, le débat se durcit entre les partisans et les adversaires de la gestation pour autrui ou, pour la compréhension de tous, de la légalisation de la pratique des mères por¬teuses. Or l’interdiction est la règle. Le Code civil, en intégrant la première loi de bioéthique de 1994, prévoit que le corps hu¬main, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial, que les conventions ayant pour effet de confé¬rer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont nulles, de même que toute convention por¬tant sur la procréation ou la gestation pour autrui.

Les grandes institutions telles que le Conseil d’Etat, l’office par¬lementaire des choix scientifiques et technologiques, l’Agence de la biomédecine ou le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé se sont récemment pro¬noncées contre toute modification de l’état de droit. Le débat traverse les partis politiques, de droite comme de gauche.

Confortés par le progrès médical laissant à penser que « tout devient possible », les partisans de la légalisation des mères porteuses défendent une position qui serait justifiée par l’im¬périeuse nécessité d’encadrer des pratiques qui, de toute façon, seraient appelées à se multiplier. Si l’on suit leur approche, il s’agit, pour le droit civil, de répondre à une demande sociale du « droit absolu à l’enfant », dans une vision « moderne, progres¬siste » de la société. On encadrerait ce qu’ils définissent comme un don, même s’ils reconnaissent qu’il faut prévoir une com¬pensation financière, en tant que réparation économique d’un service rendu.
En réalité, ce serait une régression pour la société et pour les droits des femmes.
Imposture juridique. La légalisation des mères porteuses, sous prétexte d’encadrer des dérives, constitue une imposture juridique, car elle ne saurait résoudre les conflits inévitables entre le couple commanditaire et la mère propriétaire de son utérus. Il resterait toujours des difficultés potentiellement dra¬matiques pour l’un comme pour l’autre, si les personnes chan¬gent d’avis au cours de la grossesse ou lors de l’accouchement, ou en cas de désaccord ultérieur sur la rémunération. C’est un leurre de penser que la demande sociale et la règle de droit doi¬vent toujours s’accorder. La légalisation ne servirait qu’à vali¬der juridiquement le fait accompli, sous prétexte que d’autres pays autorisent cette pratique. Pourtant, la situation varie lar¬gement selon les pays : la Belgique, le Royaume-Uni, l’Ukraine, la Russie ou la Grèce y sont favorables, de même que certains Etats américains, l’Argentine, le Brésil ou l’Iran, alors que la Suisse, l’Autriche, l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne interdisent les mères porteuses.

Le débat n’est pas celui de pseudomodernistes face à de pseudo-archaïques, pour ou contre un « droit absolu à l’enfant », sans qu’à aucun moment les conséquences psychologiques pour la mère biologique et pour l’enfant n’aient été analysées.
Surtout, il s’agit d’un marché procréatif, et non d’un don dans le cadre de rapports humains devenus altruistes. La gestation pour autrui peut constituer une source de revenus pour les femmes pauvres des pays développés, solution alternative ou complé¬mentaire aux emplois à domicile qui restent souvent la seule opportunité pour celles qui sont au chômage. De plus, au plan international, et dans un cadre mondialisé, on assiste à une ex¬ploitation des uté¬rus des femmes pauvres des pays du Sud au profit des berceaux des couples riches des pays du Nord. Il ne faut pas croire que la légalisation de cette pratique, en France, pourrait mettre fin au trafic actuel entre les pays du Nord et ceux du Sud. Les intérêts marchands sont bien là, entre les sites, les agences et les firmes, entre les pays, entre les couples com¬manditaires et les utérus des femmes à louer. Mais les pratiques déviantes ne peuvent en aucun cas justifier une dérive éthique.

Enfin, la référence abusive au droit à l’interruption volontaire de grossesse, avancée par les partisans de la légalisation de la pratique des mères porteuses, ne doit pas nous abuser : ce se¬rait une régression pour les droits des femmes, devenues ainsi mères – forcément mères –, par une exploitation marchande de leur utérus. Ce serait une régression sociétale conçue dans une optique libérale reposant sur le « tout est permis puisqu’il s’agit de lever une interdiction », étape supplémentaire dans la confusion des valeurs, de l’argent et de l’éthique pour ce qui n’est qu’un système de « location-ventre ».


(*) Et ancienne conseillère au cabinet de Lionel Jospin.
« C’est un leurre de penser que la demande sociale et la règle de droit doivent toujours s’accorder. »

dimanche 30 janvier 2011

Le Planning Familial : « La femme n’est pas un outil vivant » (janvier 2011)

Conclusions du texte du groupe de travail « bioéthique » du Planning Familial,
Sur la GPA
Débattu et adopté par le Conseil d’Administration des 30 et 31 janvier 2010


Le Planning a toujours dénoncé l’exploitation du corps des femmes par les hommes, or la Gestation Pour Autrui (GPA) entraîne une instrumentalisation et une marchandisation du corps de la femme.

Nous ne devons pas accepter le commerce du corps humain et une nouvelle forme d’esclavage des femmes au nom d’une solidarité avec les femmes stériles, pas plus qu’ avec les couples homosexuels.

Nous pensons à l’instar de S. Agacinski qu’en ne légalisant pas la GPA, "la France n’est pas en retard, mais en avance, pour la protection, par la loi, de la dignité des personnes et de leur corps ».

« La femme n’est pas un outil vivant ».

D’autres pistes sont à envisager pour répondre au désir d'enfant exprimé par les couples hétéro ou homosexuels :

  • faciliter et favoriser l’adoption,
  • assurer un meilleur accès aux soins de santé sexuelle et reproductive,
  • favoriser auprès de tous une information scientifique et raisonnée, ni culpabilisante ni angoissante sur l’infertilité,
  • intégrer aux cours d’éducation sexuelle l’information sur cette question,
  • poursuivre très activement les recherches sur l’infertilité qui augmente aussi bien chez les hommes que chez les femmes,
  • aider les couples infertiles en leur assurant un soutien à la réflexion (médiation, conseil conjugal, groupes de paroles) .


Le MFPF entend faire part de ses analyses :

  • sur la norme sociale que représente la parentalité à tout prix, avec sa dérive de désir de filiation biologique,
  • sur la dépossession du corps des femmes instrumentalisé pour la production d'enfant par la technique médicale au service de la domination de genre,
  •  sur la diversité existante ou historique des structures sociales familiales performantes dans l'épanouissement des enfants hors du modèle du couple hétérosexuel stable,
  • sur la nécessité de lutte contre les inégalités sociales et pour l'égalité des hommes et des femmes.


Une loi autorisant la GPA ne répond pas à ces constats ou principes de base : il ne faut donc pas la légaliser.

jeudi 25 novembre 2010

Mères porteuses : extension du domaine de l'aliénation

Signataires de la Note


Laure Adler, Sylviane Agacinski, Jean-Marc Ayrault, Danièle Bousquet, Laurent Bouvet, Nicole Bricq, Alain Christnacht, Alain Claes, Dominique de Comble de Nayves, Caroline De Haas, Laurence Dumont, Caroline Eliacheff, René Frydman, Roger Godino, Elisabeth Guigou, Gisèle Halimi, Benoit Hamon, Lionel Jospin, Danièle Jourdain-Menninger, Hakim El Karaoui, Bruno Laforestrie, Olivier Lyon-Caen, Bertrand Mabille, Philippe Mauguin, Nina Mitz, Jean Peyrelevade, Michel Rocard, Maurice Ronai, Michèle Sabban, Florence Schmidt-Pariset, Catherine Tasca, Serge Telle, Jean-Philippe Thiellay, Jean-Noël Tronc, François Véron, François Villeroy de Galhau


Ils ont souhaité s'associer à la position hostile à la légalisation des mères porteuses en France:



Patricia Adam, Députée du Finistère) 
Delphine Batho, Députée des Deux-Sèvres
Marie-Odile Bouillé, Députée de la Loire-Atlantique
Monique Boulestin, Députée de la Haute-Vienne
Pascale Crozon, Députée du Rhône
Michèle Delaunay, Députée de la Gironde 
Bernard Derosier, Député du Nord
Laurence Dumont, Députée du Calvados

Martine Faure, Députée de la Gironde 
Geneviève Fioraso, Députée de l'Isère
Catherine Genisson, Députée du Pas-de-Calais
Armand Jung, Député du Bas-Rhin
Marietta Karamanli, Députée de la Sarthe
Catherine Quere, Député de la Charente-Maritime
Marcel Rogemont, Député de l’Ille-et-Vilaine
Marisol Touraine, Députée de l'Indre-et-Loire
Philippe Vuilque , Député des Ardennes
Guy Delcourt, Député-Maire de Lens
Philippe Duron, Député du Calvados 
Jean Yves le Déaut, Député de Meurthe et Moselle

Kader Arif, député européen
Stéphane Le Foll, député européen


Nicole PERY, ancienne Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle
Laurence Rossignol, Vice-Présidente de la Région Picardie, Secrétaire Nationale à l'Environnement du Parti Socialiste
Dominique GILLOT, Maire d’Eragny,  ancienne Secrétaire d’Etat à la santé
Clotilde Valter, membre du Bureau National du Parti Socialiste
Cécile ESCOBAR, Adjointe au maire de Cergy 
Dominique GILLOT, Maire d’Eragny,  ancienne Secrétaire d’Etat à la santé
Alain Lhostis, Conseiller de Paris, ancien président délégué de l'AP-HP de 2001 à 2008


Cécile Alvergnat, ancien membre de la CNIL
Jean-Claude Ameisen, Président du comité d'éthique de l'Inserm
Constance Canivet
Agnès JEANNET
Brigitte Joseph-Jeanneney, IGAS
Bettina Laville, avocate
Michela Marazano, philosophe
Olga Trostiansky, présidente de la Coordination française du lobby européen des femmes (CLEF)

Si vous souhaitez vous joindre à cette démarche, vous pouvez écrire  à l'adresse suivante : nonalagpa@gmail.com


Dans votre message, merci de préciser si vous souhaitez que votre nom apparaisse sur ce site, aux côtés  des actuels signataires.








Mères porteuses : extension du domaine de l'aliénation
(Synthèse de la note)



A l’approche de la révision de la loi bioéthique, plusieurs initiatives ont été prises ces derniers mois en faveur d’une légalisation des mères porteuses, ou gestation pour autrui (GPA), en France. Ainsi, deux propositions de loi allant dans ce sens ont été déposées en des termes identiques au Sénat le 27 janvier 2010. En février 2010, une note de la fondation Terra Nova, rédigée par un groupe de travail sur la bioéthique, s’est prononcée en faveur de cette légalisation.

Pourtant, au sein même de la fondation Terra Nova, une partie des membres du conseil d’administration et du conseil d’orientation scientifique s’est au contraire exprimée fermement contre la légalisation de cette pratique en France.

La présente note résulte des échanges d’un groupe de réflexion associant des personnes de formation diverse, réunies dans une hostilité commune à l’idée d’une telle légalisation. Elle a pour but d’exposer les arguments des adversaires de cette légalisation et souligne combien le recours aux mères porteuses est absolument contraire à tout engagement de nature « progressiste ».

Cette hostilité résolue se fonde d’abord sur une conviction : le recours aux mères porteuses participe d’une logique profondément réactionnaire pour les droits des femmes, en ce qu’elle implique une instrumentalisation du corps féminin.

Loin de s’inscrire dans la logique d’une « parentalité progressiste », selon la formule de ses partisans, le recours aux mères porteuses induit une vision régressive de la parentalité, par la supériorité du lien biologique qu’il pose inévitablement sur les autres modes de filiation, et en particulier sur l’adoption.

Partout où elle a été légalisée dans le monde, la pratique des mères porteuses se traduit concrètement par une nouvelle exploitation, radicale, au sens où il s’agit de la prise de contrôle sur la vie d’un être humain pendant neuf mois, et généralement d’un rapport inégalitaire et d’aliénation, entre commanditaires aisés et mères porteuses défavorisées souvent recrutées par des sociétés aux pratiques marchandes plus ou moins attentatoires à la dignité humaine.

Sa légalisation ouvrirait la voie à d’autres remises en cause : en donnant pouvoir à autrui sur la grossesse d’une femme, elle pourrait menacer le droit à l’avortement ; en reconnaissant le droit par contrat d’aliéner son corps à autrui, elle faciliterait l’émergence d’un cadre légal que ne manqueraient pas d’utiliser les promoteurs de la prostitution.

Au terme de nos travaux, fondés sur une étude concrète de la réalité des mères porteuses dans le monde, nous arrivons à cette conclusion simple qu’il n’y a pas d’entre-deux possible. L’idée d’un encadrement de la pratique par sa légalisation est une chimère.

La pratique, qui existe dans de nombreux pays, depuis de nombreuses années, conduit partout aux mêmes conséquences. Loin de régler les cas difficiles, la légalisation des mères porteuses provoquerait un recul de l’état de droit en France et provoquerait des conflits douloureux entre commanditaires et mères porteuses, conflits dont les premières victimes seraient les enfants.

La détresse des parents qui souhaitent, mais ne peuvent, avoir des enfants doit être entendue. La réponse passe par un discours responsable qui rappelle qu’il n’existe pas de « droit à l’enfant », mais aussi par une amélioration des conditions de l’adoption, notamment internationale, pour laquelle la France peut agir.

Le désir des personnes homosexuelles qui souhaitent accéder, elles-aussi, en toute transparence, à la parentalité, doit être pris en compte, même si la parenté homosexuelle est un débat que la présente note ne tranche pas. En outre, la réalisation de ce désir par l’adoption rencontrerait des limites, en particulier du fait de l’interdiction à l’adoption par les célibataires dans de nombreux pays.

Quant aux personnes qui font appel, aujourd’hui, aux solutions existant hors de France pour recourir à des mères porteuses, elles se placent en dehors de la loi et elles se font les complices de pratiques qui appellent la réprobation, non la reconnaissance.

La légalisation en France des mères porteuses n’arrêterait en rien les dégâts constatés à l’étranger. Elle nourrirait au contraire ce commerce du corps féminin qu’il faut combattre avec résolution, en particulier dans ses conséquences scandaleuses pour les femmes les plus défavorisées, celles des pays en voie de développement contraintes à cette nouvelle forme d’exploitation.

Demain, d’autres combats vont devoir être menés pour la cause des femmes et la défense des acquis progressistes. La disparition du servage et l’abolition de la domesticité au XVIIIème siècle, l’abolition définitive de l’esclavage au XIXème siècle, la fin de l’infériorité juridique de la femme au XXème siècle sont autant d’étapes essentielles dans la marche vers le progrès de la société française. L’inaliénabilité de la personne humaine doit être consacrée au XXIème siècle.

Espérons que notre pays saura rester ferme dans son refus de la régression catastrophique que constituerait la légalisation des mères porteuses, mais aussi que nous trouverons le chemin d’un combat réellement progressiste, celui qui verrait la France s’engager dans une action internationale pour l’abolition de cette pratique rétrograde.




Extraits de la note 


1 - LA LEGALISATION DES MERES PORTEUSES, UN PIEGE JURIDIQUE

1.1 - LE CADRE LEGAL ACTUEL DE LA GESTATION POUR AUTRUI

[…] En 1994, une loi (loi du 29/071994) énonce les grands principes qui confirment le principe législatif d’interdiction du recours aux mères porteuses, que la loi de 2004 n’a pas remis en cause :

- le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial (article 16-1 du code civil) ;

- les conventions ayant pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont nulles (article 16-5 code civil) ;

- toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle (article 16-7 code civil) ;

[…] Depuis, la question des mères porteuses est régulièrement l’objet de débats en France. Plusieurs institutions se sont prononcées contre toute légalisation, en particulier l’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST) du Parlement, en novembre 2008, du Conseil d’Etat, en mai 2009, de l’Agence de la biomédecine en septembre 2009, renforcés par l’avis négatif du Comité consultatif national d’éthique du 6 mai 2010.

[…] Le projet de loi relatif à la bioéthique, présenté en Conseil des ministres le 20 octobre 2010, n’aborde pas la question de la gestation pour autrui, dont l’interdiction reste donc, pour l’instant, la règle en France.

Dans les autres pays, la situation légale et pratique de la gestation pour autrui est très contrastée. En Europe, certains pays admettent la gestation pour autrui, comme la Belgique, le Royaume-Uni, l’Ukraine, la Russie ou la Grèce. A l’inverse la Suisse, l’Autriche, l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne interdisent les mères porteuses. Aux Etats-Unis, la situation varie selon les Etats . Les mères porteuses sont également admises en Argentine, en Iran, en Israël ou au Brésil, par exemple. Au Japon, l’organisme national Science Council a proposé, fin 2008, une interdiction totale de la pratique.

Dans la plupart des cas, les législations autorisant les mères porteuses sont récentes et remontent, pour l’essentiel, aux années quatre-vingt-dix, d’où l’argument de ses partisans en France d’une tendance inéluctable et nécessaire dans laquelle la France devrait s’inscrire.

La mise en œuvre des mères porteuses donne partout lieu à une rémunération, « habillée » dans certains pays, comme au Royaume-Uni, sous le terme pudique de « compensation » (compensation). Les motivations des commanditaires ont également fait l’objet de nombreuses études. Les deux cas les plus fréquents, quel que soit le pays étudié, sont les couples stériles et les homosexuels, en couple ou célibataires.

[…] Dans les agences de mères porteuses, les formules les plus coûteuses, qui peuvent dépasser 100 000 $ aux Etats-Unis, offrent un niveau de « service » impressionnant : contrôle total sur la mère, en particulier sanitaire, tout au long de la grossesse et possibilité de « réversion » (notamment contrat garantissant l’avortement de la mère porteuse au cas où le commanditaire change d’avis). La logique commerciale est portée à son comble : à condition d’en avoir les moyens, il est possible d’éviter pratiquement toute démarche pour se voir « livrer » un bébé.

1.2 - LA LEGALISATION DES MERES PORTEUSES PROVOQUE UNE MULTITUDE DE CONFLITS DE DROITS AUX CONSEQUENCES SOUVENT DRAMATIQUES.

[…] On peut regrouper les principaux types de conflits en trois cas de figure :
- La mère porteuse change d’avis et souhaite conserver l’enfant ou au contraire veut avorter.

- Les parents commanditaires changent d’avis et ne veulent plus de l’enfant.

- Les commanditaires et la mère porteuse entrent en conflit sur les conditions matérielles d’exécution du contrat.

[…] Ainsi, sous prétexte « d’avancée juridique », on aboutit à la création d’un état de droit générateur d’un désordre juridique, et de conflits entre personnes particulièrement complexes et traumatisants.

1.3 - FAUT-IL VALIDER JURIDIQUEMENT LE FAIT ACCOMPLI ?

[…] Parmi la diversité des raisonnements en faveur de la légalisation des mères porteuses, on entend aussi celui de personnes qui, tout en exprimant leur malaise, voire leur rejet des mères porteuses, considèrent qu’une validation juridique est préférable au maintien de la précarité juridique dans laquelle se trouvent les familles ayant eu recours aux mères porteuses. C’est exactement le raisonnement tenu lorsqu’il est demandé de régulariser des pratiques illégales en France mais légales dans d’autres pays, comme la polygamie, au motif de la situation effectivement douloureuses des secondes ou des troisièmes épouses.

Le droit n’a pas non plus à suivre toutes les « demandes sociales » ou toutes les évolutions de la société, ni surtout à s’adapter nécessairement au fait accompli imposé par quelques personnes, quelles que soient les difficultés dans lesquels ces couples se sont placés en pleine connaissance de cause.

1.4 - UNE RESPONSABILITE INTERNATIONALE DE LA FRANCE

[…] Le fait de légaliser les mères porteuses en France :

- n’éviterait pas le recours aux mères porteuses « marchandes », par des commanditaires qui en voudront toujours plus, en particulier attirés par le « marketing » des sociétés commercialisant ces « services » hors de nos frontières, comme l’a montré l’exemple d’Israël.

- n’empêcherait pas la publicité en France, via l’internet, des filières commerciales les moins encadrées.

- augmenterait au contraire le recours aux solutions étrangères, en légitimant moralement cette pratique en France. Tant que la pratique en reste illégale, beaucoup des personnes qui pourraient être tentées par cette solution en sont dissuadées par l’interdiction légale, et renoncent à avoir recours à la démarche, hasardeuse et coûteuse, d’une mère porteuse à l’étranger.

- renforcerait l’essor international de cette pratique, par le rôle d’exemple indiscutable que notre pays a dans le monde en matière juridique, et dans le domaine de la bioéthique.

1.5 - LE STATUT JURIDIQUE DES ENFANTS NES DE MERE PORTEUSE

[…] En pratique, parler, comme on l’entend souvent, de « mise en marge de notre société » pour les enfants nés à l’étranger de mère porteuse ne correspond pas à la réalité : l’absence de transcription de l’acte d’état civil étranger ne fait pas obstacle à ce que cet état civil étranger soit utilisé par les parents dans la vie courante, par exemple pour l’école, la santé ou dans les rapports avec des administrations. L’article 47 du code civil reconnaît en effet la valeur de preuve de l’acte d’état civil régulièrement dressé à l’étranger.

1.6 - PRIMAUTE DU GENETIQUE ET DROIT A L’ENFANT

[…] La sacralisation du lien génétique qu’exprime la demande de mères porteuses nous paraît doublement régressive : d’une part, parce qu’elle pose de fait une hiérarchie des modes de parenté au détriment des enfants adoptés et de leurs parents, injuste et dangereuse. D’autre part, parce qu’elle relève d’une vision génétique de la filiation aux perspectives inquiétantes. Le temps n’est pas si loin où l’obsession génétique était au centre des questions d’identité et de famille.

Le principe doit être posé nettement : il n’y a pas de « droit absolu à l’enfant ». La démocratie n’est pas faite seulement de l’équilibre des libertés, selon la formule bien connue selon laquelle la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres. Elle est aussi déterminée par l’équilibre entre des droits, qui peuvent entrer en opposition.

Le droit d’avoir des enfants ne peut l’emporter sur d’autres droits et obligations, dont la supériorité doit être posée : droit à la dignité de la personne humaine ; obligation de la société de protéger les droits des individus, même contre eux-mêmes, surtout les plus faibles.

1.7 - UNE NECESSAIRE EVOLUTION DES REGLES EN MATIERE D’ADOPTION

[…] Le nombre de projets supposés de mères porteuses en France est dérisoire, rapporté aux 10 000 demandes d’adoption déposées en France chaque année.

[…] C’est donc la procédure de l’adoption en France qu’il conviendrait d’améliorer, notamment par la simplification des procédures (il faut en moyenne neuf mois pour avoir un agrément).

2 - LE MARCHE DES MERES PORTEUSES, NOUVELLE FRONTIERE DE L’EXPLOITATION ?

[…] La pratique observée dans tous les pays où elle est autorisée entraîne de graves dégâts, et, très souvent, un rapport d’exploitation entre commanditaires et mère porteuse.

[…] L’exploitation que ces conventions entraîne s’illustre à la fois au plan national, puisque les mères porteuses sont en majorité issues des classes défavorisées, et entre pays développés et pays en développement, du fait du trafic international de plus en plus organisé auquel le marché des mères porteuses donne lieu.

[…]Ainsi, dans une étude de 1988, l’U.S. Office of Technology Assessment a montré que la plupart des couples commanditaires appartiennent aux catégories favorisées, à niveau d’éducation élevé, avec un revenu supérieur à 50 000 $. A l’inverse, « la plupart des mères porteuses se situent autour du revenu minimum. Seules 4% des mères porteuses sont diplômées et plus de 40% d’entre elles sont sans emploi et/ou dependent des aides publiques ».

2.1 - L’EXPLOITATION DES FEMMES PAUVRES DU SUD PAR LE NORD

Mais c’est dans leur dimension d’exploitation entre le Nord et le Sud que les dégâts auxquels aboutit la pratique des mères porteuses sont les plus évidents : le marché des mères porteuses est l’une des illustrations les plus récentes, et les plus violentes, de l’exploitation des populations fragilisées des pays en développement par les habitants des pays développés et, plus précisément, par les « habitants riches » des pays développés, compte-tenu du coût élevé de ces démarches.

[…]Le cas de l’Inde est particulièrement parlant, puisque la pratique des mères porteuses s’y développe très rapidement, à la fois par une exploitation des femmes pauvres par les femmes riches de l’Inde et par des couples venus des pays développés, en particulier la Corée, le Japon et le Royaume-Uni.

[…] Ainsi, la pratique des mères porteuses conduit à l’exploitation directe des plus pauvres du Sud par les plus riches du Nord : peu de cause pourraient sembler plus claires aux progressistes, et c’est pourtant au nom d’une vision « progressiste » que beaucoup souhaitent que la France rejoigne un mouvement international encore tout à fait résistible.

3 - DES CONSEQUENCES PSYCHOLOGIQUES LARGEMENT SOUS-ESTIMEES

[…] Le fait que la relation entre parents commanditaires et mère porteuse passe forcément par une relation contractuelle, sans parler de l’échange financier, fait naître chez l’enfant l’idée qu’il est aussi un objet, le résultat d’une transaction marchande. De fait, le contrat assimile l’enfant à naître à une chose, qui doit être fournie par la mère porteuse aux parents commanditaires.

[…] Mais le dommage psychologique ne concerne pas que l’enfant issu des mères porteuses. Il porte aussi sur la mère porteuse elle-même. Or, la tendance permanente des partisans de la gestation pour autrui à l’euphémisation, conduirait, si on n’y prenait garde, à faire oublier que pour la mère porteuse, il s’agit d’une grossesse comme un autre.


4 - LES MERES PORTEUSES, UNE CAUSE REGRESSIVE ET UN MAUVAIS COMBAT POUR LA GAUCHE

4.1 - UNE ALIENATION NOUVELLE

La pratique des mères porteuses renvoie fondamentalement à la notion d’aliénation, au sens de la transformation des capacités intrinsèques à un individu particulier en « objets ». Ici, l’objet est la fonction reproductive. La mère porteuse met son utérus à la disposition d'autrui. Elle ne vit plus pour elle-même mais pour un commanditaire, le temps de faire un bébé. Etendre la logique marchande à la fonction reproductive c’est franchir une étape supplémentaire dans le sens de l’aliénation de l’être humain.

[…] L’aliénation suprême est celle de son propre corps : c’est ce à quoi tend la pratique des mères porteuses. Il est étrange de voir des gens de gauche, si critiques à l'égard de l'emprise du marché dans tous les domaines (santé, culture, etc) se montrer aussi indifférents au marché du corps.

4.2 - LEGALISATION DES MERES PORTEUSES ET DE LA PROSTITUTION, UN LIEN EVIDENT

[…] Les principes posés aujourd’hui dans le droit français qui font obstacle à la pratique des mères porteuses sont aussi un obstacle fondamental à la banalisation de la prostitution.

4.3 - LE FUTUR

les avancées rapides de la science en matière de biotechnologies exigent de se poser déjà la question de la « suite » et permettent d’imaginer un futur proche où les techniques de greffe d’utérus, voire à plus long terme, d’ectogénèse (les technologies extra-corporelles de gestation) ouvriront de nouvelles perspectives.